C'teuh symphonie et les idées m’enivre, faites moi les oublier ! - [ PV Willows SLADE ]

« Mon corps est un jardin, ma volonté est son jardinier. »
William Shakespeare

5h10 pm

Fixage de plafond, jusqu'au moindre détail, qu’elle connaissait déjà ; une minuscule fissure à peine perceptible, créée par une crise de foi de son défunt voisin obèse du dessus. Depuis maintenant deux mois il n’y avait personne à cet appartement. Ni dans celui de gauche, et tout autant dans celui de droite. Seule une vieille sourde qui prenait un chien sauvage trouvé dans une rue, à fouiller dans les poubelles, pour son chat, et ça depuis maintenant cinq ans. Il faudrait la prévenir un jour. Ce genre d’isolation lui permettait d’écouter au volume qu’elle souhaitait toute sa playliste, des heures durant. Lex soupira doucement, ça faisait depuis maintenant une demi-heure qu’elle toisait son mur du dessus. Elle prit un long moment avant de s’asseoir, de se tenir la tête ; s’inventant un mal de tête. La jeune fille repensa à une citation, d’un grand homme qui plus est. Cette simple idée de se remémorer cette célèbre phrase, elle le prenait sérieusement, comme un signe. En fait, à chaque fois qu’elle se souvient d’un détail, elle le prend comme un geste du destin ; sans pour autant être créationnisme. Alors, prenant son courage et sa volonté à deux mains, qu’elle posa d’ailleurs respectivement sur ses genoux, elle se leva. Pris une télécommande et son portable, fit un petit clique sur cette première pour allumer sa playliste qu’elle aimait tant (♪). Toujours à l’aléatoire, pour lui donner un peu de piquant, de surprise, sinon, elle risquait d’apprendre l’ordre par cœur. Elle se dandinait, comme si elle essayait de danser, elle avait le rythme et la gestuelle, mais le contexte rendait cette scène stupide. En effet, Lex venait de sortir de son lit, habillée d’une simple petite culotte en dentelle et de l’odeur des pétards d’hier soir. La douche s’impose. Malgré les endroits où elle aime trainer, Jared, apprécie être propre sur elle. Il est rare de la voir vomir, elle se retient, elle dit que ça passera. Elle trouve le vomi laid, pas beau, sale, idiot, grossier. Ce qui n’est pas totalement faux.

7h pm

Passons sa prestigieuse préparation. Elle sortie de chez elle, ferma à clés, non pas à double tours, mais à nonuple tours. Elle avait plusieurs verrous, qui lui prenait à eux seuls, dix minutes chaque jours. La vieille du dessous était encore une fois à sa porte. On penserait presque qu’elle dort là. Cette octogénaire cherche à chaque minute de la journée la compagnie d’un être civilisé, elle apprécie d’ailleurs grandement Lex car elle passe plusieurs fois devant son porche. Elle ne rate pas une occasion de lui dire bonjour ou de quémander une conversation, même une petite attention. Lex ne lui a jamais parlé.

En s’avançant à grands pas dans la première rue de Seattle, telle une urbaine séduisante mais pressée. On l’a regardait, elle les regardait aussi. Sa tenue surprenait, et il était rare de voir les mêmes personnes dans une si grande ville. Alors, chaque jour, Lex avait le droit à quelques regards étonnés, voir parfois même outrés. Un des ses passe-temps était d’ailleurs de les fixer à son tour, de façon déstabilisante, avec les yeux ahuris d’un hibou. Ce qui est très désagréable, je ne vous le souhaite pas. Ses yeux redevenaient tout aussi froids et sombre après ce genre de « bataille de regards », qui se finissait le plus souvent par une vision du sol de l’interlocuteur. Aujourd’hui, comme à l’accoutumée, ses iris étaient cachées par des lentilles d’or, et ses cheveux, par sa perruque rouquine fétiche. Ses habits quant à eux étaient d’un style du 18ème, tout en étant assez moulants et détaillés pour être féminins et moderne. Elle marchait, encore et encore, ne sachant pas vraiment où aller, elle se trouvait dans le territoire nord, celui des Madness Factorie. Elle pensait peut-être, ou pas. En fait, je ne sais pas comment finir cette phrase, Lex chantonnait la chanson qu’elle avait dans la tête depuis bientôt deux heures et demie. Elle se sentait un peu seule avec la mélodie. Pourtant la rue et les restaurants alentours étaient bondés, les lampadaires allumés, les troubadours du 21 ème siècle présents pour nous faire entendre et voir l’aboutissement de leurs entraînements. Mais Lex, elle, chantonnait, tête haute, à fixer le lampadaire sous lequel elle se trouvait pour attendre le suivant. Elle réfléchissait au pourquoi du comment de se souvenir, cette citation devait lui être passé dans la tête pour la faire se lever. Comme si son cerveau feintait contre son esprit. « Mon jardin personnel doit être rempli de cannabis et d’arbres qui font pousser des armes, ainsi que de fleurs décorées de pilules d’extasies. » s’expliqua-t-elle à haute voix, pouvant surprendre les piétons à ses côtés, pour se remettre les idées claires. Elle en avait marre d'être aussi atteinte par de simples choses, ne pas pouvoir profiter et se vider la tête sans avoir besoin de s'être piquée avec une seringue. Un gargouillement de l’estomac stoppa son chantonnement qu’elle entretenait depuis avoir cliqué sur cette foutue télécommande. Il était déjà dix neuf heure trente, ayant jeuné hier et ce matin, pour cause de drogue et sommeil, ce bruit gênant s’expliquait. Maintenant, il ne restait plus qu’à trouver quelqu’un pour lui payer le restaurant ; bah ouais, elle allait pas payer elle-même, attend !

Spoiler:

Messages : 18 Date d'inscription : 28/03/2011

Demoiselle. Un verre?

Le problème lorsque l’on ne veut rien faire comme les autres, c’est que ça a souvent tendance à nous compliquer la vie. Cloitré depuis le début de la matinée dans son atelier, Willows en était au moment où l’on se maudit d’avoir d’avantage compté sur sa mémoire auditive que sur la magie du dictaphone. A réflexion faite, cet appareil avait peut-être vraiment été inventé pour une bonne raison, à laquelle il n’avait manifestement pas porté suffisamment d’attention. L’ambiance de cette fin de soirée était tranquille, un grand silence semblait régner dans le quartier où habitait le journaliste. Un vague ronronnement emplissait l’espace, vague rappel de la circulation qui affluait au bas de l’immeuble et qui perturbait allègrement la concentration du jeune homme. Enfin, pour peu qu’il en ait bien entendu. Appuyé contre la porte coulissante du balcon, il hésitait entre poursuivre ses laborieuses recherches sur le sujet qu’il était censé traiter et aller se balader et trouver quelque chose à faire en ville. Partit ainsi, il se doutait qu’il ne tirerait plus rien de sa mémoire et qu’il allait rapidement s’ennuyer, ou alors se retrouver à buller en essayant de se convaincre qu’il travaillait. Tant pis, autant prendre l’option d’aller traîner dehors et d’essayer de trouver quelque chose à faire, de préférence un tant soit peu constructif. S’arrachant avec lenteur à la contemplation des sommets des gratte-ciels qu’il avait devant lui, il fit volte-face et s’attela à la recherche des affaires qu’il voulait emporter avec lui. D’ordinaire plutôt organisé, Willows s’était laissé aller ces derniers temps et regrettait maintenant de ne pas avoir accordé d’avantage d’attention au rangement de son atelier. Les lunettes d’aviateurs étaient autour de son cou, ses gants masquaient ses mains mais il n’avait aucune idée d’où est-ce que pouvait bien se trouver le sac qui contenait ses deux revolvers et sa pipe.

Après avoir perdues quelques minutes, une vingtaine au total, à retourner son appartement dans tous les sens, le jeune homme finit par remettre la main sur ses affaires. Il rangerait en rentrant, il n’avait pas envie de s’y mettre maintenant (l’on doit admettre qu’il y a plus passionnant comme occupation). Il ferma sa porte d’un simple tour après avoir passée la bandoulière noire à son épaule, il n’accordait jamais plus d’attention à cette partie de la sécurité de son logement. Après avoir fait un tour en Irlande, il avait finit par adopter leur mode de pensée et partait du principe que si quelqu’un voulait entrer, ce ne serait pas une petite serrure qui poserait problème. S’il devait y avoir effraction, autant que ça se fasse avec le moins de dégâts possibles, ce qui le poussait à rendre l’entrée la moins difficile possible.

Willows aimait déambuler dans les rues sans but précis, c’était l’une des activités qu’il considérait comme « reposante ». Arrêter de se torturer les méninges quelques temps était décidément bien agréable. Marcher simplement dans les rues en zieutant autour de lui à la manière d’un touriste lui permettait de voir sa ville autrement qu’en tant que membre d’un gang. Il ne se distinguait pas vraiment de ceux qui l’entouraient, vêtu sobrement d’une veste grise et d’un jean bleu marine. Il ne considérait pas l’originalité vestimentaire comme bénéfique pour ses deux métiers, il l’évitait autant que possible. En revanche, cela ne semblait pas déplaire à certains et certaines de ceux qu’il croisait, il y en avait de tout de même de sacrés egocentriques dans ce bled. Les couleurs vives étaient au rendez-vous en cette soirée, il y avait beaucoup de jeunes gens qui gravitaient entre les terrasses des cafés et les arches des bars. Une longue chevelure rousse attira tout particulièrement son attention, un peu plus loin devant lui, éclairée par la lueur d’un lampadaire. La demoiselle était sans doute l’une de ces fêtards qui préparaient une nuit agitée, elle semblait attendre quelque chose, ou quelqu’un. Tout en s’approchant d’elle, un doute lui vint à l’esprit, cette jeune fille lui disait quelque chose, peut-être l’avait-il déjà vue quelque part…

La réponse lui vint rapidement, il la connaissait en effet. A vrai dire, il avait même été plutôt long à la détente, il n’y avait pas beaucoup de personnes qui se baladaient avec ces cheveux flamboyants et des vêtements qui semblaient tous droits sortis du 18ème siècle. Il s’agissait de Lex, celle qui lui procurait les munitions de ses Mausers et celle avec laquelle il aimait accessoirement passer un peu de temps. Il n’aurait jamais songé la croiser ce soir là mais puisqu’il y était, autant aller la voir. Il avait peut-être trouvé son occupation de la soirée, si elle n’attendait pas quelqu’un d’autre que lui. Il se dirigea doucement vers elle et la héla une fois arrivé à son hauteur :

Tiens ? Qui aurait cru que j’aurai l’occasion de rencontrer une jolie demoiselle dans un endroit pareil !

Willows aimait bien cette personne, son originalité et son éloignement de la banalité étaient passionnants, il aimait l’écouter parler. Elle n’était pas de ces gens fades qu’il était parfois obligé de fréquenter, elle sortait de son petit quotidien et rendait leurs rencontres intéressantes. Continuant sur sa lancée, il ne perdit pas de temps et s’informa de suite sur son programme pour les heures qui suivaient :

Dis-moi… tu attends quelqu’un ? … Sinon, ça te dirais de m’accompagner quelque part ? Un petit tour au restaurant par exemple ?

Spoiler:

Clap, clap, clap… Un applaudissement qui semblait se mériter, acclamait lourdement un groupe d’acteurs des rues. Ils venaient de montrer leurs talents de danseurs en timing. Un nombre incomptable de piétons s’étaient stoppés pour les admirer. Lex était quant à elle de l’autre côté de la rue, les épaules tombantes par un certain désappointement d’avoir raté la scène, la tête haute pour essayer d’apercevoir les artistes. Elle décida finalement de monter sur le couvercle d’un vide ordure, que les passants n’hésitaient pas à ignorer vue l’état de la rue, tout en se tenant à un lampadaire pour plus d’aisance dans ce qu’elle aurait voulu voir. Ce ne fut pourtant pas très utile car peu de temps après les spectateurs se dispersaient pour reprendre leur route. Elle se laissa tomber sur son postérieur, laissant entendre un colossal soupir d’un air totalement immature, avec en plus de ça, tous les muscles du visage qui présentaient son désespoir. Les saltimbanques s’en allaient, en emportant avec eux tout espoir d’une nouvelle représentation. La jeune extravagante regardait de son air déçu les petites bêtes volantes qui l’entouraient. Elle sauta de la corbeille, légèrement rassurée, après s’être souvenu que ce ne s’était pas son odeur corporelle qui les attirait. Son ventre gargouillait encore plus fort que précédemment et sa pensé, quant à elle, ne s’était pas stopper à la simple réflexion qu’elle avait avoué à voix haute, laissant entendre sa divagation excentrique naturelle aux inconnus l’entourant. Mais pour l’instant ce qui lui importait le plus était de se remplir l’estomac.
Du haut de ses talons décorées et compensées, pour cacher sa petitesse, elle regardait ses allant-tours avec plus en plus de morosité. Son visage était presque normal, plus neutre, et moins ahurie que lorsqu’elle méditait longuement. Elle ne voyait que des gens assez normaux pour être ennuyant, elle essayait de se convaincre que chacun avait une vie passionnante, n’arrivant pas à s’en persuader pour se les imaginer et atteindre l’amusement. Son pied se leva, pour ainsi continuer sa route, tout en songeant à ses petites pilules colorées qui lui apportaient tant de « bonheur, amusement et passion » et qui servaient aussi de coupe-faim. Ce qui lui manquait en masse. « Et si j’en prenais une petite rien qu’une pe-… »

« Tiens ? Qui aurait cru que j’aurai l’occasion de rencontrer une jolie demoiselle dans un endroit pareil ! »

Une voix masculine l’avait appelé dans son dos. Elle frissonna longuement, loin d’être habituée à ce qu’on ose lui parler aussi familièrement. Lex essaya d’analyser les cordes vocales de l’inconnu pour ainsi se retourner avec aisance et lui dire son nom comme si de rien n’était, ne voulant pas le laisser dans l’humiliation de ne pas marquer l’esprit de la jeune fille. Malheureusement, la réflexion fut assez longue pour laisser des doutes sur les souvenirs qu’avait Lex de l’inconnu. Elle se retournait, sourire niait aux lèvres et annonça un « Toiii.. ! » loin d’être convainquant. C’est alors qu’elle put l’examiner plus précisément. Il n’était pas plus grand qu’elle, en compte ses chaussures, avec la peau pâle et des cheveux bruns en pagailles. Aussi beau que certaines personnes vues ce jour, il était pour elle quelconque. Mais en ressentant un léger « déjà-vu », elle se mit à cogiter, cherchant dans les méandres de sa mémoire.

Un client.

Elle s’en souvenait maintenant, une relation qu’ils avaient en commun les avaient mis en contact pour que la jeune fille lui fournisse des pièces rares pour son arme. Et parfois, ils se rencontraient lors de soirée loin d’être chrétienne et elle se plaisait à lui parler, il semblait très à l’écoute comme garçon. Elle ne pouvait malheureusement pas se souvenir de son nom. Wi… Will, un truc du genre, doutait-elle. M’enfin ça ne l’importait pas tant qu’il avait assez d’argent pour satisfaire ses achats. Tant que ce n’était pas une activité commerçante concurrente, ou tant qu’il ne s’agissait pas de ses autorités qui n’acceptent pas de pot-de-vin. Alors elle se dit qu’il voulait tout simplement l’amadouer, elle tourna les talons et commença de nouveau sa route. Les mains dans les poches, le visage devenu plus effacé que fier et les jambes forcées à marcher. Tout ça dans l’ennui le plus total, elle s’était finalement décidée à prendre ses fichus pilules auxquelles elle vouait un amour aussi maudit que soumit.

« Dis-moi… tu attends quelqu’un ? … Sinon, ça te dirais de m’accompagner quelque part ? Un petit tour au restaurant par exemple ? »

Seul un mot avait attiré son attention, ou plus exactement, avait réveillé son ventre pour la sixième fois en quelques minutes. Elle se stoppa, encore une fois, ne sachant pas s’il fallait accepter. A son habitude elle aurait sauté sur l’occasion. Mais là, sa cervelle lui criait au désespoir l’envi d’une pilule alors que son ventre pleurait famine. Ses yeux étaient grands ouverts, comme si eux aussi attendaient une décision de la part de Lex. Ce fut un moment bien frustrant pour son alter-égo et elle-même. Parfois, elle avait l’impression que la dose de médicaments qu’elle prenait la dépossédait de son corps, de ses envies et de son propre esprit. La chanson revenait sans cesse dans sa tête, elle criait à l’intérieur de son crâne, elle n’écoutait la musique que pour lui faire oublier ses problèmes de dépendance, mais là, ils ne faisaient que lui amplifier ses maux. Elle ferma les yeux en se claquant le front de sa main gauche. Malgré que le coup venait d’elle et donc ne devait normalement pas la surprendre, il la réveilla. Elle finit par prendre la décision la plus raisonnable.

« Attendre quelqu’un ? Non. T’accompagner quelque part ? Je pense en être obligé puisque le restaurant me plait bien. So, tu payes. » affirma-t-elle pour finir, de son ton sec et pourtant d’une voix légère et aigu, malgré toutes les cigarettes qu’elle se fume.

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Il était assez ambigu pour le jeune homme d’avoir croisée cette jeune femme en cette soirée qui aurait pourtant pu être monotone et accompagnée d’un arrière-goût de mélancolie. Il avait pensé à la base terminer sa journée comme il l’avait commencée, c’est-à-dire dans la plus simple quiétude et en la finissant dans un bar accompagné d’une compagnie assez quelconque. Il ne s’était strictement rien passé de suffisamment intéressant pour lui faire croire qu’il pourrait arriver quelque chose d’un tant soit peu attirant. L’allure terne qui l’entourait alors qu’il marchait un peu au hasard dans les rues bondées ne l’avait pas vraiment inspiré, le quotidien qui s’était installé dans la ville l’ennuyait. Aller vers les gens qu’il croisait tout en déambulant n’était pas son truc, ces personnes ne l’intéressaient pas, sans pour paraître insignifiantes à ses yeux. Il ne s’en préoccupait pas, voilà tout, ils n’attiraient pas son regard et lui étaient par conséquent indifférents. Aussi avait-il été ravi de voir ces couleurs vives à travers la foule, cela allait sans doute lui permettre de sauver sa soirée. La jeune femme était telle qu’il en avait gardé le souvenir, une exubérante originale qui semblait issue d’un mélange de Pirates des Caraïbes et de Pulp Fiction. Bien qu’il n’ait cela dit encore jamais croisé un personnage évadé d’un film ayant élu domicile sur le couvercle d’un vide ordures. Pour un peu, il aurait défini la situation comme plutôt cocasse, bien que ses manières lui interdisent d’oser penser une telle chose d’une demoiselle (parce que môsieur est un maniaque et qu’il ne trouve pas ça poli). Toujours était-il que Willows avait visiblement attiré son attention, à en juger par le temps d’arrêt qu’elle avait marqué avant de se retourner et de lui faire face. L’exclamation peu convaincante qu’elle lui lança le fit douter deux secondes qu’elle l’eut reconnu, c’était assez de l’ordre du « Toiii… t’es qui déjà… ? ». Bah, il n’était pas du genre à en prendre ombrage, après tout il mettait un point d’honneur à ne pas veiller à trop sortir de l’ordinaire.

Pour un peu, il se serait détourné lorsqu’elle avait tourné les talons et avait commencé à vider les lieux profil bas. Il se doutait ne pas lui avoir fait peur, puisque c’était de toute manière théoriquement impossible, peut-être n’avait-elle simplement pas envie d’avoir de la compagnie. Il avait en revanche sourit lorsqu’elle s’était arrêtée, comme si elle réagissait à ce qu’il venait de lui proposer. Lui tournant le dos, elle semblait en proie à un terrible dilemme l’empêchant de tout mouvement, il s’attendait presque à voir de la fumée s’échapper de ses oreilles. Ces instants de réflexion intense ne durèrent pas. Elle se claqua le front du plat de l’une de ses mains d’un geste brusque qui sembla la tirer d’un profond moment de lag avant de virevolter vers le jeune homme.

Attendre quelqu’un ? Non. T’accompagner quelque part ? Je pense en être obligé puisque le restaurant me plait bien. So, tu payes.

Bon, elle venait visiblement de changer d’avis à la vue des options qui s’offraient à elle. Lex correspondait vraiment parfaitement à l’image que Will avait gardée d’elle, autant dans son physique resplendissant que dans son caractère direct et… amusant. Elle ne se posait pas question, c’était le moins que l’on puisse dire. Heureusement pour elle, il avait sous-entendu dans sa question qu’il l’invitait, et que par conséquent il en avait les moyens. Il acquiesça d’un signe de la tête et l’invita à le suivre. Il fréquentait de temps en temps le centre-ville, où se trouvaient la majorité des places touristiques, et où il y avait suffisamment d’animation pour occuper les soirées. A force de venir fêter tel ou tel événement avec telle ou telle connaissance ou ami, il avait fini par repérer quelques établissements qui valaient le goût d’œil et qui ravissaient le palais pour un prix acceptable. Le quartier vers lequel les jeunes gens se dirigeaient n’était pas loin, ils y arrivèrent rapidement et purent reluquer tranquillement la façade des restaurants qui s’offraient à eux. Il y en avait de diverses sortes, aux atours plus ou moins attrayants et dont il était toujours intéressant d’observer la clientèle qui en sortait. Willows aimait les endroits pas nécessairement réputés mais dans lesquels on pouvait avoir droit à un minimum de distinction, surtout lorsque l’on était accompagné d’une dame. Eh oui, dur d’être vieux jeu. Il se tourna un instant vers Lex et l’interrogea d’une voix douce :

Une préférence gustative ? Sinon je connais un peu l’établissement de cuisines du monde là-bas, ils ont beaucoup de choix et c’est de la qualité. Ils viennent de reconstruire, un incendie avait ravagé le bâtiment le mois dernier (troisième fois en deux mois, ça fait quand même beaucoup, nan ?).

Après deux secondes et trente nano de réflexion, ils finirent par porter leur choix sur ce restaurant, que Lex semblait elle aussi avoir déjà fréquenté. L’endroit était assez classique dans le style des bâtisses qui proposaient du choix en allant des plats orientaux les plus simples aux européens les plus raffinés. La décoration était sobre sans pour autant être négligée et le rendu des couleurs était plaisant aux yeux, la jeune fille semblait sortie tout droit d’une fresque disposée au fond de la salle. Ses longs cheveux roux contrastaient joliment avec le reste des teintes. Un membre du personnel en costume les accueillis et leur indiqua une table où s’installer en attendant que le chef vienne leur présenter ses menus. Une fois assis et le dos calé contre le dossier de sa chaise, Willows fixa son regard sombre sur le visage de sa compagne et prit la parole de sa voix calme :

Ça faisait longtemps… alors, donnes-moi un peu de tes nouvelles, ça va comme tu veux depuis la dernière fois ? Toujours fourrées entre tes munitions et deux séries animées ?

Il se souvenait avoir longuement conversé avec elle sur une théorie comme quoi le Joker et Batman auraient (peut-être) pu être amis, dans une autre vie. Elle l’avait beaucoup impressionné par sa grande culture en matière de films, d’animes et autres, c’était une vraie bibliothèque dans le genre. Il s’était vaguement demandé où est-ce qu’elle trouvait tout ce temps pour visionner tous ces longs ou courts-métrages. Lui-même prenait un petit moment de temps à autres pour aller faire un tour au cinéma ou pour se passionner pour une série mais c’était très occasionnel.